Interférences électromagnétiques
Introduction
Le rayonnement électromagnétique se réfère à l’énergie des ondes électromagnétiques qui se propagent dans l’espace.
Nous sommes tous familiers avec les termes de radio, de micro-ondes, de lumière et rayons X – ils représentent tous différentes fréquences de rayonnement électromagnétique. La lumière que nous voyons avec nos yeux ne représente qu’une infime portion du spectre électromagnétique, comprise entre 400-700 térahertz (THz).
Les ondes radios concernent les fréquences qui vont des KHz aux GHz, qui incluent également les émissions Wifi, BlueTooth, les communications de téléphonie mobile, les communications satellites et bien évidement la radio FM.
Toutes ces ondes radios et de communication sont très utiles, cependant nos appareils électroniques peuvent également générer des rayonnements non intentionnels, non désirés, qui peuvent interagir avec d’autres appareils ainsi qu’avec leur propre communication intentionnelle (par exemple si notre appareil communique par Wifi).
Dans des cas extrêmes, le rayonnement électromagnétique peut devenir une arme, telle l’impulsion électromagnétique (EMP pour electro-magnetic pulse) ou les brouilleurs radio qui perturbent intentionnellement les communications.
Les appellations EMI (ElecroMagnetic Interference) et EMC (ElectroMagnetic Compatibility) – IEM ou CEM en français, représentent la façon dont nos appareils se comportent relativement aux ondes électromagnétiques. Typiquement, cela concerne les ondes radios car c’est classiquement dans cette gamme que fonctionnent nos composants électroniques via leur fréquence d’horloge, qui s’exprime en KHz, MHz et GHz.
- EMI représente le rayonnement électromagnétique involontaire émit par nos appareils (qui peut interférer avec d’autres appareils).
- EMC, pour compatibilité électromagnétique, concerne le comportement d’un appareil soumis à un rayonnement électromagnétique.
En termes de EMC, nous devons savoir si nos appareils importants (équipement médical, systèmes de gestion moteur d’un véhicule, etc) vont continuer de fonctionner correctement même s’ils sont soumis à des interférences électromagnétiques non désirées.
En termes de EMI, il faut noter que tous les composants électroniques qui commutent du courant génèrent un certain niveau de rayonnement électromagnétique, même très faible. Cependant il faut que ces émissions restent sous un certain niveau pour être en conformité avec les standards légaux.
Certification des produits
Les produits qui sont fabriqués doivent être certifiés afin de pouvoir être mis en vente sur le marché, ce qui suppose de passer les tests EMI/EMC.
Un test EMI d’émissions rayonnées peut ressembler à ce qui suit.
C’est un tracé de Bode ou graphe d’analyse fréquentielle pour lequel l’axe horizontal représente la fréquence et l’axe vertical représente l’amplitude – il montre l’amplitude des émissions dans une certaine gamme de fréquence (voir notre article sur la transformée de Fourier).
Afin de passer le test, toutes les émissions doivent être sous le niveau indiqué par la ligne orange du haut.
Si une seule émission est au-dessus de la limite spécifiée alors l’appareil ne passera pas le test.
Les tests sont faits dans une chambre spéciale (chambre anéchoïque), dans des conditions standardisées.
Une antenne reçoit les ondes émises par l’appareil et un analyseur de spectre affiche le résultat sur un graphe.
La conception d’un appareil pour qu’il soit conforme aux exigences EMI/EMC est l’inverse de la conception d’une radio. Nous voulons être certain que notre appareil n’est pas une radio (du moins en dehors des émissions que nous nous autorisons telle qu’une émission Wifi par exemple). Nous savons tous que les radios ont besoin d’une antenne. Les antennes émettent des ondes électromagnétiques lorsqu’un courant alternatif leur est appliqué (EMI) et génèrent une tension/courant lorsqu’elles reçoivent un rayonnement électromagnétique.
Techniquement, un rayonnement électromagnétique est émis par des particules chargées soumises à une accélération (ce qui arrive lorsque le courant change de sens ou se lance puis s’arrête). Une conception EMI/EMC suppose de porter une grande attention aux composants AC (commutations de tensions/courants) dans notre système ainsi qu’aux pistes (fils) qui peuvent se comporter comme des antennes.
En général, implémenter de bonnes techniques de conception haute vitesse (voir notre article sur l’introduction à la conception des circuits haute vitesse) aidera avec les problématiques EMI/EMC.
Courants de retour
Nous pouvons ne pas y penser mais chaque signal qui circule sur notre circuit doit avoir un chemin de retour. Habituellement ce chemin se fait par un lien d’alimentation telle que la masse (GND). Considérons le scénario suivant :
Nous avons deux composants qui communiquent entre eux sur notre circuit (disons un microcontrôleur et un capteur). Il existe une ligne de communication courte entre eux ; conceptuellement c’est ce à quoi nous nous intéressons lorsque nous pensons aux communications, mais il faut également penser au courant de retour par un lien d’alimentation qui peut se faire via un chemin plus long. Des chemins plus longs signifient des antennes plus grandes. Lors d’une conception EMI/EMC nous devons tenir compte du chemin de retour (lien d’alimentation) pour le rendre le plus court possible (antenne plus petite).
Dans une implémentation haute vitesse nous utiliserons généralement un circuit 4 couches, les couches internes servant de plans d’alimentation. Le fait d’ajouter simplement des traversées avec le plan d’alimentation au plus près des composants, permet d’obtenir un chemin de retour court pour les courants (le plan d’alimentation est indiqué en bleu, les lignes blanches représentent conceptuellement les chemins du courant)
Nous devons absolument vérifier qu’il n’existe aucune rupture dans le plan d’alimentation, car il peut en résulter des chemins longs (à nouveau, les lignes blanches représentent conceptuellement les chemins du courant).
Ceci est toujours en conformité avec les principes de conception à haute vitesse qui assurent que l’impédance sera constante le long des lignes à haute vitesse.
Chemin de moindre impédance
En termes d’impédance, il est intéressant de savoir que alors que les courants DC suivent un chemin de moindre résistance, les courants alternatifs AC suivent un chemin de moindre réactance (impédance) : en AC la réactance est équivalente à une résistance. Si vous n’êtes pas familiers avec la notion de réactance/impédance, voir notre article sur les filtres passifs. Lorsque la fréquence augmente, l’élément inductif de la réactance joue un rôle plus important et les courants commencent principalement à suivre le chemin de moindre inductance. Ceci signifie que lorsque la fréquence augmente, les courants vont tenter de suivre le chemin directement sous les lignes de signal concernées.
C’est pourquoi il est important d’éviter une rupture dans le plan d’alimentation sous les lignes à haute vitesse. Même si la ligne de signal suit un chemin étrange, le courant de retour tentera toujours de suivre le même parcours en-dessous à des fréquences élevées.
Condensateurs de découplage
En relation avec les demandes de courant par les composants du circuit (par exemple, lorsqu’un CPU demande plus de puissance pour de calculs complexes)., les courants sur les pistes d’alimentation vont changer également – ces pistes deviendront des antennes. En ayant suffisamment de condensateurs de découplage sur le circuit, placés au plus près des composants appropriés, nous pouvons réduire autant que possible ce comportement. Une autre façon de visualiser cela est de considérer que les condensateurs de découplage fournissent un chemin basse impédance entre l’alimentation et la masse pour que les courants alternatifs y circulent. Vous pouvez également consulter le blog sur les condensateurs de découplage.
Couture par traversées (via stitching)
La couture par traversées consiste à placer un grand nombre de traversées entre deux (ou plus) de plans d’alimentation situés sur différentes couches du circuit.
Si nous considérons que les plans d’alimentation sont connectés et ceci même s’ils ne sont reliés que par une traversée en bordure du circuit, une modification de la demande d’alimentation et de rayonnement électromagnétique peut induire une légère différence de tension entre deux (ou plus) plan d’alimentation. En plaçant des vias de couture entre les plans d’alimentation, nous pouvons assurer que toute différence de tension qui peut survenir sera résolue par ces chemins courts ainsi créés.
Taux de variations (slew rates)
Ces taux représentent la vitesse de montée ou de descente d’un signal. Une tension ne change pas instantanément : elle met toujours un certain temps pour passer d’un niveau à un autre. Il résulte de ces transitions très rapides une accélération rapide des particules chargées donc de fortes émissions de radiations électromagnétiques. Une autre façon de voir cela intervient dans la transformée de Fourier (voir notre article) qui montre que plus il y a des signaux carrés donc de fronts, plus nous serons confrontés à des signaux à hautes fréquences. Pour cette raison, il est possible de régler le « slew rate » sur certains microcontrôleurs, afin de réduire la vitesse de transition et ainsi agir sur la pente des signaux carrés. La réduction des « slew rate » peut aider à réduire les émissions de rayonnements électromagnétiques.
Etalement
Certains circuits intégrés ont des bus de communication larges qui incluent une option pour étaler la commutation des lignes individuelles dans le bus. Echelonner la commutation, plutôt que de commuter toutes les lignes à la fois, peut aider à répartir l’EMI résultante dans le temps et ainsi réduire dans un niveau acceptable l’EMI totale qui survient à un moment donné.
Blindage
Le blindage est souvent la première solution à laquelle on pense en termes de EMI/EMC mais concrètement cela devrait être la dernière à intervenir après tous les points évoqués plus haut. Les signaux peuvent s’échapper par de très petites ouvertures, tels que les bords d’un circuit imprimé. Par analogie, quelquefois le blindage est équivalent à essayer de réparer un produit mécanique avec une quantité abondante de ruban adhésif. Ceci dit, le blindage a toute sa place bien qu’il ne devrait pas être la solution première et directe losr de la conception d’un bon PCB.
Regardez cette vidéo qui explique comment appliquer le blindage et les coutures dans Proteus.
Résumé
Un design EMI/EMC implique de considérer la nature AC (commutation) des composants du système et prendre des mesures pour réduire la taille des boucles de courant. Habituellement, un design qui a été conduit en suivant les principes des circuits à hautes vitesses aura un bon EMI/EMC. Les principes tels que s’assurer qu’il n’y a pas de rupture sur les plans d’alimentation placés sous les pistes hautes vitesses, une bonne utilisation des condensateurs de découplage, des traversées vers les plans d’alimentation autour des CI qui commutent et plus généralement limiter autant que faire ce peut la longueur des pistes hautes fréquences, aideront pour un bon EMI/EMC. Les circuits convertisseurs DC-DC, par exemple, devraient être aussi petits et reserrés que possible, avec des condensateurs de découplage à proximité. Un design 2 couches qui ne passe pas les tests EMI/EMC pourrait passer simplement en utilisant un circuit 4 couches avec les plans de masse positionnés sur les couches internes et des traversées de couture près des CI. Une analyse plus approfondie peut être conduite par la recherche des fréquences générées par le circuit et de la cause probable de cette génération. Il est possible d’utiliser des outils tels que des sondes de champ proche, d’utiliser des cellules TEM pour des tests rapides de préqualification en observant l’impact des modifications apportées au hardware ou au software, de se servir d’outils tel qu’un scanner EM.
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Traduction française
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